
Dans son Rapport mondial 2022, l’organisation Human Rights Watch dénonce l’incompétence des autorités du Liban qui ont « délibérément plongé le pays dans l’une des pires crises économiques de l’époque moderne, faisant preuve d’un total mépris pour les droits de la population ».
L’ONG Human Rights Watch, qui se donne pour mission de défendre les droits de l’homme, vient de publier son Rapport mondial 2022, dont c’est la 32e édition. L’organisation y examine « les pratiques en matière de droits humains dans près de 100 pays » et s’est notamment attardée sur la situation du Liban.
Human Rights Watch évoque l’impact « catastrophique et sans précédent » de la crise économique sur les droits des habitants du pays où près de « 80% de la population vit désormais en-dessous du seuil de pauvreté, dont 36% dans une pauvreté extrême – contre 8 % en 2019 ».
Aya Majzoub, chercheuse sur le Liban auprès de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord de Human Rights Watch dénonce dans « le contexte d’une des plus graves crises économiques des temps modernes », « l’indifférence flagrante des dirigeants libanais aux souffrances de la population ». Une indifférence au caractère « quasi criminel », selon la chercheuse.
« La communauté internationale devrait utiliser tous les outils dont elle dispose pour presser les décideurs politiques libanais de mettre en place les réformes nécessaires pour sortir le Liban de cette crise, y compris en infligeant des sanctions aux dirigeants responsables des graves violations des droits humains qui continuent d’être commises dans le pays », poursuit-elle.
Plus d’un an après l’explosion du port de Beyrouth qui a fait plus de 200 morts et a laissé environ 300 000 habitants sans abri, le pays du Cèdre s’enfonce chaque jour un peu plus dans ce que l’avocat et écrivain libanais Alexandre Najjar décrivait déjà en octobre dernier comme la crise la plus grave de l’histoire du Liban contemporain.
En effet, comme le note le Rapport d’Human Rights Watch, les habitants du pays ont de plus en plus de mal à se procurer « des biens ou des services fondamentaux », en cause notamment la chute de la livre libanaise qui a perdu 90% de sa valeur depuis octobre 2019. De plus, les pénuries de carburant causent régulièrement des « coupures généralisées d’électricité » qui peuvent durer jusqu’à 23h, selon le Rapport.
L’organisation dénonce également le fait que « personne n’a été amené à rendre des comptes pour l’explosion catastrophique survenue le 4 août 2020 au port de Beyrouth ». Elle révèle qu’une enquête menée par ses équipes, « a permis de découvrir des éléments tendant fortement à prouver que certains responsables gouvernementaux avaient connaissance des risques mortels que posait la présence dans le port de stocks de nitrate d’ammonium, et qu’ils avaient tacitement accepté ces risques ».
Une attitude qui, selon Human Rights Watch, « s’apparente à une violation du droit à la vie ».
Camille Westphal Perrier